Antoine Bertrandy – Vers Compostelle – Drôles de rencontres
Rédigé le 10 juin 2015 ~ Coup de coeur Inside !
Enfin, ce matin-là, j’ai douté. Je dis «enfin», car jusqu’à présent, sans trop savoir comment, j’ai évité les grandes douleurs et les petites misères qu’on m’avait dites incontournables. Voilà deux semaines que je suis partie de Saint-jean-pied-de-Port, et cinq jours que je marche seul sur les méandres mortellement droits de la Meseta. Le vague à l’âme a désormais chassé l’allégresse des premières foulées et des premières rencontres.
Deuxième livre que je lis sur Compostelle en deux mois, dois-je y voir un signe? Le premier étant Détour Sur la Route de Compostelle de Mylène Gilbert-Dumas. Et deux autres vont arriver bientôt sur le blog ! Je crois qu’il est clair que ce chemin m’attire énormément, il faut que j’arrête de me le cacher à moi même : un jour j’irai à Compostelle!
Antoine Bertrandy s’est arraché à son confort pour s’élancer dans le sillage des pèlerins aspirés par le mystère du chemin de Saint-Jacques. Il a relié Saint-Jean-Pied-de-Port, dans les Pyrénées-Atlantiques, à Compostelle en empruntant le Camino real Frances. De cette expérience en résulte un récit riche de rencontres truculentes, de séparations déchirantes et de moments drolatiques.
Un texte prodigue en réflexions sur le sens du pèlerinage et, en somme, sur la vie.
Je crois que de tous les récits que j’ai lu sur ce pèlerinage, le livre d’Antoine Bertrandy est celui qui m’a le plus parlé.
L’auteur est parti avec son sac à dos marcher sur le chemin, car il souhaitait réaliser un désir ancien. Une envie de découverte et de liberté, mais en s’interrogeant longuement sur ses motivations à parcourir le chemin.
p128 « Au fait, qu’est-ce donc qu’un pèlerinage ? Je ne sais plus ce dont il s’agit. Un voyage au long cours ? Un voyage intérieur ? Un voyage vers l’apôtre ? Une colonie de vacances pour adulte ? Que dois-je attendre de cette aventure ? C’est le grand flou. »
Dès sa mise en route, on est dans le bain et sa première nuit – ou plutôt petit déjeuner – chez Azine, sa première logeuse à Saint-Jean-Pied-de-Port est épique !
Je sais déjà que je vais me régaler à lire ses aventures et je ne me suis pas trompée, car j’ai très souvent sourie à lire les déboires de ses nuits en collectivité ou des feintes pour « perdre » un pèlerin trop collant. J’ai aimé son honnêteté, il ne cache ni ses doutes, ni ses difficultés, ni ses coups de cœur (au risque de froisser sa femme à son retour), il nous les conte avec beaucoup d’humour.
On distingue deux étapes dans son cheminement, il y a un avant et un après la Meseta (plaine désertique de 200km entre Burgos et Leon).
Avant, Antoine trace la route, vite, très vite, il suit son guide et ses cartes à la lettre, trop finalement, car il n’a pas de place pour l’imprévu. Après cette épreuve, il en prend conscience et décide alors de les abandonner, ne réserve plus ses hébergements à l’avance, il laisse le chemin décider pour lui et une autre aventure commence pour lui.
Certaines choses m’ont surprise dans ce livre (et m’ont conforté dans mon idée que ce chemin était de plus en plus mercantile c’est que certaines églises hors-saison sont : soit fermées, soit payantes ou bien de devoir payer 150€ si l’on veut voir se balancer le Botafumeiro (lien)
Le retour d’un tel périple laisse des traces physiques et psychologiques que les gens n’ayant pas entrepris un tel voyage ne peuvent comprendre. Quoi de mieux qu’un livre pour leur expliquer en a décidé l’auteur. Et je l’en remercie.
L’écriture d’Antoine Bertrandy est fluide et très agréable à lire, le récit est découpé en étape avec une petite citation, pensée, couplet de chanson à la fin de celle-ci.
P67 « Le bon déroulement de mon Chemin ne dépend pas de moi : seul l’appui de compagnons pourra me permettre d’avancer. »
P88 « Maria est la seule personne que j’aie rencontrée, qui a vraiment accepté de s’arrêter, de se poser au bord de la route, de laisser le monde avancer sans elle et le temps s’écouler sans chercher à le retenir. Pendant trois jours, elle a vu des centaines de pèlerins surgir de son passé – le chemin qu’elle avait parcouru – et s’engouffrer dans son avenir – le chemin qui lui était encore inconnu, impuissante à les y accompagner. »
P92 « Si nous partageons tous le même chemin, chaque pèlerinage est un voyage unique »
P304 « Atteindre Compostelle, c’est aussi la mort du pèlerin comme métaphore. L’abandon du bourdon, de la besace et de la calebasse. Le prolongement du camido sur son propre sentier[…] comme une étape vers un autre soi. »
« Vers Compostelle. Drôles de rencontres » est une lecture vraiment enrichissante qui m’a énormément parlé.
Je souhaite à ce récit tout le succès qu’a pu avoir l’Immortelle randonnée de Jean- Christophe Ruffin (j’en parle ici), voir plus, car je trouve le livre d’Antoine plus dans le vrai.
Si vous commencez ce livre, ne prévoyez rien à faire dans les heures qui suivent, car vous ne pourrez pas le lâcher.
Merci à Transboréal pour cette belle lecture qui m’a donné envie d’enfiler mes chaussures et mon sac à dos.
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Antoine Bertrandy – Vers Compostelle – Drôles de rencontres est publié dans la catégorie Récits de voyages avec le(s) Thème(s) : Compostelle, coup de coeur, Transboréal
J’aurais sans doute déjà lu ce livre (il est sur mes étagères!) s’il n’y avait pas eu le mois anglais, mais, promis, encore deux romans anglais et j’attaque du non anglais!!! J’ai hâte.
Un jour Compostelle pour toi? Je connais quelqu’un qui l’a fait (une bonne marcheuse) j’ai vu son album photo.
Pas facile de caser toutes nos lectures hein Si tu savais le nombre de livres que je voudrais lire là tout de suite ! J’ai hâte aussi d’avoir ton avis. Oui un jour j’irai à Compostelle, j’ai déjà marché sur le sentier 3 jours lors de ma rando de 15 jours sur le sentier de St Guihlem le désert. Ces trois jours on été les plus intenses en rencontre que tous le restant de mon périple. C’est pour cela que j’ai autant aimé ce livre, car il met en avant les rencontres justement
Cela doit être agréable à lire 🙂 !
Je l’ai dévoré et je vais le conseiller autour de moi maintenant !
Je note précieusement le titre. J’ai lu « Immortelle Randonnée » deJC Rufin et l’ouvrage d’Alix de st André sur le même thème, j’ai adoré !
merci pour ce billet
tu aimeras forcement celui-ci alors ! j’ai aussi lu les deux que tu cites et celui la les surpasse ! je vais bientôt repartir pour une lecture Compostelle avec dis maman c est encore loin Compostelle 🙂 qui m’a l’air très prometteur aussi.
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